Résumé

Le programme conduit en 1988-1989 à Côtes-de-Fer (Haïti) par INTERAIDE et la Coopération française avait pour objectif d’améliorer l’accès à l’eau et la santé dans le cadre des soins de santé primaires. Il a permis la construction de 18 citernes familiales en ferro-ciment (12 m³), de 10 captages de sources et de 3 puits, accompagnés d’une vaste action d’éducation sanitaire ayant touché plus de 1 100 familles.

Les analyses bactériologiques révèlent que l’eau collectée sur des toitures en tôle et stockée dans les citernes est généralement de bonne qualité, rarement contaminée fécalement et souvent potable — contrairement à l’eau des réseaux urbains ou des puits ouverts, fréquemment polluée. La chloration est pratiquée par 80 % des familles, et l’entretien régulier des citernes est largement assuré.

Les impacts observés sont multiples : réduction d’environ deux heures par jour du temps consacré à la corvée d’eau, amélioration de l’hygiène corporelle et domestique (toilettes, lessive, vaisselle), augmentation de la disponibilité en eau (16 litres/jour par famille contre moins de 10 auparavant). Les citernes soutiennent ainsi de meilleures pratiques d’hygiène et contribuent à la baisse des diarrhées, parasitoses et affections cutanées, tout en améliorant l’alimentation des jeunes enfants.

L’eau seule ne suffit toutefois pas à éliminer les maladies hydriques : une éducation sanitaire reste indispensable (hygiène des mains, hygiène alimentaire et gestion des excrétas), de même que l’intégration des citernes dans une stratégie plus large associant santé, scolarisation et activités agricoles. Le coût d’une citerne est évalué à 540 USD, dont 150 pris en charge par la famille bénéficiaire. L’investissement est jugé rentable : il allège la charge de travail des femmes et peut favoriser des activités productives (maraîchage, petit élevage, artisanat).

Comparées à d’autres modes d’approvisionnement (puits ouverts, réseaux, impluviums), les citernes familiales apparaissent comme la solution la plus durable et la plus sûre pour l’usage domestique, à condition d’être accompagnées d’un entretien régulier, d’une formation adéquate et d’un appui financier (notamment via le crédit).

En conclusion, les citernes familiales fournissent une eau de bonne qualité, améliorent nettement les conditions de vie et constituent une option économiquement viable. Leur impact sanitaire maximal, cependant, suppose une approche intégrée de santé publique et de développement.

 

Pourquoi le lire ?

Cet article montre que la construction de citernes familiales en Haïti dépasse largement la seule question de l’accès à l’eau : elle influence directement la santé publique, le temps disponible des ménages et l’économie domestique. Il met en lumière le lien étroit entre maîtrise de l’eau, amélioration de l’hygiène — du corps, de l’alimentation et de l’habitat — et diminution des maladies diarrhéiques. L’étude souligne aussi les conditions essentielles de réussite : participation des familles, entretien régulier, éducation sanitaire et inscription de ces actions dans une stratégie plus large de soins primaires. À travers le cas de Côtes-de-Fer, le texte propose une analyse précieuse de l’articulation entre une innovation technique simple et ses effets sociaux et sanitaires durables, utile à quiconque travaille sur les relations entre eau, santé et développement rural.